L’Education de la Vierge (par Sainte-Anne) - Maurice Sand, d’après Delacroix
juillet 1842, Eglise Sainte-Anne de Nohant
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L’Education de la Vierge de Maurice Sand sur la plateforme POP
(plateforme ouverte du patrimoine - Ministère de la Culture) :
https://pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/IM36000532
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En juin 1842, en séjour à Nohant pour la première fois avec la ferme intention de ne pas toucher ses pinceaux, Delacroix se laisse émouvoir par une scène bucolique surprise lors d’une promenade dans le parc de Nohant : « Je viens de voir en rentrant dans le parc un motif de tableau superbe, une scène qui m’a beaucoup touché. C’était votre fermière, avec sa petite fille. J’ai pu les regarder tout à mon aise derrière un buisson où elles ne me voyaient pas. Toutes deux étaient assises sur un tronc d’arbre. La vieille avait une main posée sur l’épaule de l’enfant qui apprenait attentivement une leçon de lecture. »
(Propos rapportés par Alfred Robaut, rédacteur du premier catalogue raisonné de l’œuvre du peintre)
L’Education de la Vierge - Eugène Delacroix - juin 1842
Musée national Eugène Delacroix
crayon de graphite sur papier
© 2021 Musée du Louvre (dist. RMN-GP) / Hervé Lewandowski
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De cette scène il fait un tableau, qu’il associe à un sujet religieux, « L’Education de la Vierge (par Sainte-Anne) », et qu’il destine à l’église Sainte-Anne de Nohant.
Il écrit à son ami Jean-Baptiste Pierret : « [...] Je vais m’amuser avec le fils de la maison à entreprendre un petit tableau pour l’église du lieu [...] ».
Mais l’œuvre une fois achevée, George Sand souhaite la conserver auprès d’elle.
Elle écrira au peintre à propos de son tableau : « je me retrempe un peu avec ma sainte Anne et ma petite Vierge. Je les regarde en cachette quand je me sens défaillir, je les trouve si vraies, si naïves, si pures que je me remets au travail… » (Correspondance de George Sand, tome 5, lettre n°2483)
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En juillet de la même année, George Sand demande à son fils Maurice de faire une copie du tableau pour l’église.
Certes, Maurice Dudevant, 19 ans, qui plus tard, comme sa mère, utilisera le pseudonyme de Sand, est un touche-à-tout de talent. Passionné par les sciences naturelles, amoureux du théâtre, excellent dessinateur, il deviendra auteur, entomologiste et un illustrateur reconnu. Toutefois, bien qu’élève de Delacroix, il est très loin d’être un peintre de premier plan.
Face au travail du Maître, l’élève hésite et renâcle, George Sand avoue à Delacroix : « Maurice a été tout imbécile jusqu’à présent. Il n’a rien fait que préparer sa toile pour copier sainte Anne. Il tourne autour et la regarde d’un air penaud, en disant Sapristi ! Sapristi ! Je sais bien ce que cela veut dire. Il voudrait faire et n’ose pas… » (Correspondance de George Sand, tome 5, lettre n°2483)
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La copie achevée, elle est installée dans l’église et, créée pour le lieu, elle y restera plus de cent-soixante-dix ans sans dommages, d’abord contre le mur gauche de la nef, ainsi que nous le décrit Adrien Marx dans le compte rendu qu’il fait des funérailles de George Sand dans Le Figaro du 12 juin 1876, puis au-dessus de l’autel principal, avant de trouver sa place dans la chapelle latérale sud, là aussi au-dessus de l’autel comme le précise la fiche de la plateforme ouverte du patrimoine (POP) du Ministère de la Culture.
Au début du XXe siècle, après la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat du 9 décembre 1905, et surtout avec celle du 2 janvier 1907, l’église Sainte-Anne de Nohant et tout les biens meubles qu’elle renferme deviennent propriétés communales. Le tableau de Maurice Sand n’y échappe pas, toujours aujourd’hui propriété de la commune de Nohant-Vic.
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Le 15 mars 1961 l’œuvre de Maurice Sand bénéficie d’un classement et d’une protection au titre des monuments historiques. Il serait intéressant de pouvoir consulter le dossier de demande de classement pour en connaître les raisons. L’intérêt patrimonial du bien ne réside bien évidemment pas dans ses qualités artistiques, mais bien plus certainement dans le contexte historique de sa création et dans son environnement : le lieu de création, Nohant et la maison de George Sand, et le lieu d’implantation, l’église Sainte-Anne
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Extrait de cet environnement il y a manifestement, pour L’Education de la Vierge, une perte des repères et du sens.
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Les importants travaux de restauration de l’église Sainte-Anne, terminés aujourd’hui depuis longtemps, ont amené la communauté de communes La Châtre et Sainte-Sévère, à laquelle la commune de Nohant-Vic à délégué ce pouvoir, à mettre l’œuvre en dépôt au musée George Sand et de la Vallée Noire à La Châtre.
La convention signée en 2005 entre les parties précise :
Article 1
La communauté de communes La Châtre et Sainte-Sévère confie à titre de dépôt temporaire à la commune de La Châtre pour être conservée au Musée George Sand et de La Vallée Noire, l’œuvre dénommée : L’Education de la vierge de Maurice Sand.
Cette œuvre étant affectée au culte catholique de façon prééminente et permanente, en application des lois du 9 décembre 1905 et du 2 janvier 1907, le desservant affectataire donne son accord à ce dépôt.
Article 3
Le dépôt est consenti pour une durée de 2 ans renouvelable par voie d’avenant.
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Depuis, de nombreux freins ont été mis au retour de l’œuvre de Maurice Sand dans l’église pour laquelle elle a été réalisée. Aujourd’hui les membres de l’association « Les Amis de Nohant » se mobilisent et expriment le souhait que ce retour soit effectif avant les commémorations, en 2026, des 150 ans de la disparition de George Sand, dont les obsèques ont eu lieu dans cette même église et sous le regard de sainte Anne et de la Vierge.